L’Alerte Congolaise pour l’Environnement et les Droits de l’Homme (ACEDH), une association qui milite pour la protection de l’environnement a organisé ce samedi 13 juillet 2024 dans la ville de Goma une séance de mobilisation réunissant des acteurs sociaux et des cadres scientifiques sur la sauvegarde environnementale et sociale face à « l’exploitation du gaz » dans le Lac Kivu, à l’Est de la RDC.
Cette séance qui a eu lieu à l’école Sabinyo, avait pour objectif de sensibiliser et de préparer les défenseurs de l’environnement et les membres des communautés vivants autour du Lac sur l’exploitation imminente du gaz méthane et du C02. Selon Me Jovial Bakulu, écologiste de Goma et cadre de l’ACEDH, il est important d’alerter les défenseurs de l’environnement sur le fait que les 3 blocs gaziers ont été vendus par le ministère des hydrocarbures en toute illégalité et sans respect des normes environnementales et sociales, notamment l’absence de la participation de la population qui n’est jamais consultée dans ce processus. A l’en croire, celà viole les articles 7, 8 et 9 de la loi portant principes fondamentaux de la protection de l’environnement, ce que l’ACEDH dénonce.
Il est question de préparer les communautés locales à faire valoir leurs droits et à bénéficier équitablement des retombées économiques de cette exploitation, tout en veillant bien-sûr sur la protection de l’environnement, notamment le risque d’atrophisation du lac au cas où le gaz était mal exploité, explique Me Jovial Bakulu.
« […]Aujourd’hui, il était question de préparer les défenseurs des droits de l’environnement sur comment concilier, la protection ou la sauvegarde des intérêts sociaux environnementaux face à l’exploitation du gaz qui va intervenir sur le lac Kivu. Nous avons ciblé les communautés vivants autour du Lac Kivu mais aussi les défenseurs de l’environnement qui sont engagés pour défendre les intérêts des communautés afin qu’elles ne puissent pas se retrouver être surpris par les effets néfastes de cette exploitation », a-t-il expliqué.
Et de poursuivre :
« […]Nous attendons de ces communautés de comprendre la nécessité qu’il y a pour que le danger du gaz au niveau du lac Kivu soit écarté mais tout en oubliant pas les intérêts de la population , notamment les moyens de subsistance mais aussi le contrôle citoyen sur le processus d’exploitation du gaz pour que les retombés y relatifs ne puissent pas être détournés par des individus. Il y a aussi le dégazage du golf à Kabuno qui ne va pas produire actuellement de l’argent mais dans le cadre environnemental, il mérite un suivi environnemental et social. Aujourd’hui, le Gouvernement n’a pas pris des dispositions pour reboiser cet endroit où sera installé l’exploitation industrielle. Bien que le dégazage soit encore à une étape élémentaire mais la population est en train de déplorer le fait que lorsque vous passez près de la station expérimentale du dégazage, il y a maintenant des odeurs nauséabondes qui se dégagent, on ne sait pas comment ces odeurs et autres conséquences vont s’accentuer lorsque le dégazage va atteindre la phase industrielle dès lors qu’il n’y a pas d’arbres qui feront le contre poids pour le CO2 qui est en train d’y être degazé », poursuit-il.
L’exploitation du gaz, boom écologique ou économique ?
Intervenant lors de cette séance, le Professeur Charles Balagizi Directeur scientifique de l’Observatoire Volcanologique de Goma (OVG) est revenu sur l’origine du gaz présent dans le Lac Kivu. Dans son exposé, il a signifié que ce gaz est lié directement à l’activité volcanique des Virunga dont Nyamulagira et Nyiragongo.
Par ailleurs , il a alerté sur les risques d’explosion du gaz méthane et le dioxyde du carbone (CO2), d’où la nécessité de leur extraction pour la production de l’électricité. En terme écologique, le Prof. Charles Balegiza a estimé que l’extraction doit être faite de manière à respecter les aspects environnementaux.
« (…) Je crois que l’extraction du gaz méthane va apporter de l’électricité dans la région du Kivu, de Goma et Bukavu. C’est une opportunité énorme par ce que l’électricité est le moteur de développement. En terme d’écologie, je pense que cette extraction doit être faite de manière à respecter l’environnement de sorte que les impacts négatifs puissent être évités. On sent que la communauté s’approprie cette question », a-t-il soutenu.
Les participants s’approprient la campagne
Les acteurs sociaux et cadres scientifiques se sont engagés à diffuser activement les connaissances sur l’exploitation du gaz dans le lac Kivu au sein de la communauté, garantissant une préparation collective. C’est le cas de Mme Emmanuela Luanda activiste environnementale. Pour elle, il faut une grande détermination des acteurs sociaux pour défendre valablement les intérêts communautaires tout en persévérant l’environnement autour du Lac Kivu.
« Nous avons été invités par l’ACEDH qui nous a formé, qui nous a instruit, qui a renforcé notre capacité sur la justice climatique. Je vous assure que ça été un moment très bénéfique. Nous avons été formés sur l’exploitation et sur la production du gaz dans le lac Kivu, ce que nous allons transmettre à la communauté », a-t-elle fait entendre.
Il en est de même pour Kavugho Kachelewa, assistante à l’Institut Supérieur de pêche de Goma. Celle-ci s’est engagée à vulgariser le message chez les femmes et surtout les préparer psychologiquement afin qu’elles soient au courant des conséquences et des intérêts liés à l’exploitation du gaz dans le lac Kivu.
« Cette activité a été capitale par ce qu’elle nous prépare, en tant qu’activistes pour que nous puissions faire la sensibilisation de la population. Si la population n’est pas bien préparée, elle peut refuser cette extraction et pourtant, elle est bénéfique économique mais aussi ils doivent savoir les conséquences y relatives et doivent se préparer par rapport à ça. En tant que combattante, j’ai pris l’engagement pour sensibiliser les femmes et donc, j’ai le devoir d’aller vulgariser le message », rassure-t-elle.
Selon l’organisation « ACEDH asbl », le même exercice se fera sur l’île d’Idjwi, situé en plein coeur du Lac Kivu. Sur place, les habitants seront également préparés sur l’extraction du gaz méthane et du dioxyde de carbone, un projet déjà lancé par le Gouvernement congolais. Pour l’instant, Kinshasa est dans une phase élémentaire avec le bloc de Kabuno.
Magloire Tsongo à Goma